Télescope Einstein : un géant scientifique bientôt en Wallonie ?

Depuis 2019, l’Allemagne, les Pays-Bas et la Belgique travaillent de concert pour créer le plus grand observatoire européen d’ondes gravitationnelles sur le territoire de l’Euregio Meuse-Rhin. La Wallonie est partie prenante de ce projet puisque 70 % de l’infrastructure pourrait être située dans le sous-sol wallon, plus précisément sur les entités de Plombières, Aubel et Welkenraedt.

Une nouvelle façon de voir l’univers…

Installé à 250 mètres sous terre, le Télescope se présente comme l’observatoire européen le plus avancé pour la détection des ondes gravitationnelles. « Grâce à lui, les chercheurs pourront entendre les trous noirs entrer en collision et acquérir des connaissances sur les débuts de l’univers » déclarent les porteurs du projet.

Image Einstein Telescope ©️Marco Kraan/Nikhef

Gate.31 a échangé avec Adrien Dolimont, Ministre-Président de la Région wallonne, sur le Télescope Einstein et l’avenir de la recherche, de l’innovation et de la technologie en Wallonie.

Vous évoquez l’importance stratégique du Télescope Einstein pour la Région wallonne. En quoi ce projet est-il réellement « stratégique » ?  

Ce projet revêt un caractère stratégique à plusieurs égards. Tout d’abord, et comme tout projet de recherche d’envergure, le Télescope est appelé à générer des avancées technologiques majeures, des innovations dont les retombées profiteront à l’ensemble de la société. C’est ce que l’on désigne par « recherche au service de l’humanité ». D’autre part, il constitue une vitrine du savoir-faire belge (et plus particulièrement wallon) en matière de recherche et développement. 

Par ailleurs, n’oublions pas que le Télescope Einstein est un projet de grande envergure, soutenu par l’Union européenne, qui s’intègre pleinement dans la dynamique de construction de l’Espace européen de la recherche.  

C’est pourquoi nous faisons preuve d’un engagement fort à son égard. Nous avons déjà annoncé un financement de 200 millions d’euros[1].

Photo ©️ULiege
Plusieurs facteurs confèrent à la candidature belge une position favorable dans le processus de sélection. 

Ces instituts de recherche et ces entreprises collaborent déjà intensivement dans le cadre des préparatifs. Plus de 100 millions d’euros ont d’ailleurs déjà été investis dans des projets de recherche et d’innovation dans les trois pays, ce qui souligne cette coopération. De plus, des programmes européens tels que E-Test, ET2SMEs et ETT soutiennent cette collaboration, qui s’adresse non seulement aux grandes entreprises innovantes, mais aussi aux petites et moyennes entreprises. D’autre part, la région offre un cadre de vie et un climat commercial internationaux attrayants, avec de bonnes infrastructures, un bon niveau d’éducation et un environnement multilingue. La région dispose d’excellentes connexions (internationales) par route, par rail, avec de nombreux aéroports et voies navigables.

Tout d’abord, la nature du sol semble adaptée à l’amortissement des vibrations. La couche supérieure est souple et amortissante tandis qu’une couche rocheuse dure se trouve en dessous, ce qui est idéal pour la construction d’un tunnel. Bien entendu, les derniers forages et les études sismiques doivent confirmer cette image.

A côté de cela, la région des trois frontières est située au centre d’une région très bien pourvue sur le plan high-tech, avec des universités de premier plan à Liège, Maastricht et Hasselt, ainsi que d’excellents instituts de recherche et une industrie high-tech forte.

Cet écosystème industriel et scientifique de pointe est capable de soutenir un tel projet de manière crédible et compétitive. Enfin, la Belgique soutient une solution technologique particulièrement prometteuseEn effet, notre projet met en avant la construction d’un Télescope en forme de triangle qui a des vertus scientifiques avérées. La spécificité du triangle du Télescope Einstein est qu’il combine les avantages de trois interféromètres orientés différemment dans une seule infrastructure souterraine, ce qui permet d’éliminer un certain nombre de problèmes techniques, de réduire ce que l’on appelle les bruits instrumentaux, et d’avoir une sensibilité bien supérieure à celle des observatoires actuels.

Projet Einstein Telescope. Image © Marco Kraan/Nikhef

« Le Télescope Einstein constitue un projet d’une ampleur exceptionnelle, comparable – toutes proportions gardées – à celui du CERN à Genève. Sur le plan économique, les retombées seraient considérables, tant à court qu’à long termes, car l’implantation d’une telle infrastructure entraîne la création d’un véritable écosystème scientifique, industriel et technologique autour du site » – Adrien Dolimont.

Einstein Télescope : des projets de recherche majeurs

C’est en 2026 que la Wallonie saura si ce projet deviendra une réalité sur son territoire. D’ici-là, la Région wallonne a lancé quatre projets de recherche majeurs :

  • ETGEO : qui se concentre sur l’étude du sous-sol pour déterminer l’emplacement optimal du Télescope,
  • ETOPT : qui vise à développer des solutions laser et optiques innovantes pour les interféromètres du Télescope,
  • CRISTAL : qui s’appuie sur le développement d’un prototype de miroir cryogénique pour créer un laboratoire dédié à la recherche sur les technologies cryogéniques,
  • ETLOG : avec la quantité massive de données générées par le Télescope, ce projet se concentre sur le développement de logiciels avancés et d’une infrastructure de calcul robuste pour traiter efficacement ces données. 

Les quatre projets de recherche industriels poursuivent leur développement, démontrant la capacité de la région à mobiliser son écosystème scientifique et technologique autour de cette infrastructure d’exception. 

« Ces projets positionnent la Wallonie comme un acteur technologique majeur dans les domaines de l’optique, de la cryogénie, de la géologie et de la logistique de pointe » – Adrien Dolimont.

Le Télescope Einstein est un projet d’envergure qui mobilise un secteur (sciences spatiales et physique fondamentale) qui occupe une place prépondérante dans l’économie wallonne. Les retombées de ce projet seront positives tant pour les PME que pour les centres de recherche et favoriseront les échanges économiques et scientifiques transfrontaliers. 

On parle de construire l’avenir technologique de la région. Qu’entendez-vous par là ? 

Avec mon collègue, Pierre-Yves Jeholet, nous œuvrons à une réforme du décret recherche, en parfaite cohérence avec les grandes orientations européennes. Il ne s’agit pas uniquement de soutenir la recherche, mais de structurer notre écosystème de manière à lui garantir la masse critique nécessaire pour exister à l’échelle internationale.

« Aujourd’hui nous disposons de nombreux centres de recherche, nous devons massifier le secteur afin que les centres de recherche aient une taille suffisante pour devenir ou rester des leaders de leur domaine d’expertise à l’échelle internationale » – Adrien Dolimont.

A terme, je souhaiterais que la Belgique et la Wallonie en particulier soient facilement identifiables à l’international autour de thématiques clefs telles que : 

  • La recherche en matériaux avancés 
  • La simulation numérique
  • Les technologies de l’information en ce compris les applications liées à l’Intelligence Artificielle

Ce sont des domaines dans lesquels nous disposons déjà d’une solide expertise et nous n’avons pas à en rougir ! Mon objectif est, aujourd’hui, de définir et d’adopter une approche stratégique pour renforcer la visibilité, l’impact scientifique et l’attractivité de nos centres de recherche auprès des talents et d’interlocuteurs internationaux.

Quel message clé souhaitez-vous passer en Belgique et à l’étranger concernant la candidature wallonne au Télescope Einstein ?

Ce projet représente une opportunité exceptionnelle pour positionner la Wallonie comme un leader européen en physique fondamentale, pour mobiliser notre écosystème industriel autour de technologies de pointe, pour créer de nouveaux partenariats avec les territoires voisins et enfin, pour construire une nouvelle image de la Wallonie innovante et ambitieuse !

Adrien Dolimont, Ministre-Président du Gouvernement wallon (Belgique) en charge du Budget, des Finances, de la Recherche et du Bien-être animal.

[1] « Le Gouvernement wallon investira, à partir de 2028 et si le projet Télescope Einstein coporté par la Wallonie est retenu, 200 millions d’euros dans le projet Télescope Einstein. » Communiqué de presse Gouvernement de Wallonie, 4 septembre 2025. 

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